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Un sommet du Partenariat oriental a eu lieu les 29 et 30 septembre à Varsovie. Cette entreprise soulève bien des problèmes.
L’objectif du partenariat, comme celui de l’ensemble de la politique européenne de voisinage de l’Union, est d’assurer des relations stables et pacifiques avec les pays voisins à travers des relations économiques mais aussi la promotion de valeurs européennes d’Etat de Droit, de justice, de respect des droits de l’Homme. Sur le plan énergétique, l’Union européenne doit éviter que ne se reproduisent des interruptions de livraisons de gaz par l’Ukraine. L’Europe pousse son projet de gazoduc Nabuco et a besoin pour l’alimenter des ressources gazières de l’Azerbaïdjan. Les pays partenaires attendent pour leur part des bénéfices économiques et des assouplissements de la politique de visas à l’entrée dans l’Union.
Le premier obstacle concerne l’Etat de droit. La Biélorussie est un Etat totalitaire. L’Europe, depuis longtemps, y aide les radios et groupes d’opposition. Loukachenko, le président biélorusse, est un dictateur infréquentable. La Biélorussie n’a été présente à Varsovie que par son ministre des affaires étrangères, invité à titre personnel. L’Ukraine pose aussi des problèmes. Un accord d’association avec l’union européenne doit être signé le 19 décembre. Mais l’ancienne première ministre Ioulia Timochenko, est victime d’un procès politique. Les pays de l’Union sont divisés sur l’attitude à tenir : Pologne, Roumanie, Hongrie et Etats baltes souhaitent le rapprochement. L’Allemagne est sur une position dure, avec la France. Le Royaume-Uni défend une défense pragmatique des intérêts économiques européens.
L’autre dimension est géopolitique. Les pays du Partenariat oriental sont une zone de lutte d’influence entre l’Union européenne et la Russie. La Russie refuse l’importation de produits agricoles à la Biélorussie, qui menace de se tourner vers l’Union européenne. La Russie propose à la Biélorussie d’adopter le Rouble, ce qu’elle refuse. La Russie a créé une Union douanière avec la Biélorussie et le Kazakhstan et pousse l’Ukraine à y adhérer. Elle fait pression pour cela grâce à ses fournitures de gaz. L’Ukraine a officiellement une position de neutralité entre l’Europe et la Russie, mais menace de se tourner vers l’Est si le contrat d’association avec l’Union européenne n’est pas signé. Ces luttes d’influence viennent compléter celles qui ont lieu sur les questions de sécurité : conflit géorgien, candidatures de l’Ukraine et de la Géorgie à l’entrée dans l’OTAN, qui contrarient la Russie.
Enfin le partenariat oriental soulève la question des limites de l’Europe. Faut-t-il qualifier ces pays d’ «européens » ? Ce qualificatif n’est pas neutre. Il permet en théorie de défendre un projet d’adhésion à l’Union. Les Européens sont en désaccord sur cette perspective: Polonais et Britanniques soutiennent une éventuelle candidature de l’Ukraine contre l’avis des Allemands et des Français. Que dire du caractère européen des pays du Caucase que sont la Géorgie, l’Arménie, l’Azerbaïdjan ? L’Union européenne a pourtant reconnu, pour la première fois, les « aspirations européennes » des six pays membres du Partenariat.
L’Union européenne, qui a tant de mal à s’organiser à 27, continue de cultiver l’ambigüité sur ses limites. Elle instrumentalise l’espoir d’adhésion pour faire adhérer des voisins à ses valeurs, au risque de la dilution de son projet politique.