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Diffusé le 19 novembre 2012
La politique européenne de la pêche est révisée tous les 10 ans.
Les propositions de la Commission européenne, comme les compromis récemment adoptés par les Etats ne font que renouveler les échecs passés de la politique européenne de la pêche.
Les scientifiques, comme les professionnels reconnaissent que la ressource est surexploitée. Dans les eaux européennes, les poissons n’ont plus le temps de se renouveler. La situation est particulièrement critique pour les espèces vivant en eau profonde qui se reproduisent lentement. Selon la Commission européenne, près des ¾ des stocks sont en surpêche (82% en Méditerranée, 63% en Atlantique) La Commission européenne fixe des quotas de pêches à respecter par les Etats, qui, selon certaines études, sont supérieures dans 60% des cas, aux recommandations des scientifiques. Une étude récente chiffre le coût économique du « manque à pêcher » du fait de la raréfaction de la ressource. Dans l’Union européenne, elle serait de 1.8 milliards d’euros, soit 3 fois le montant des aides publiques annuelles au secteur. Le nombre de pêcheurs européens est passé de 258 000 fin des années 1990 à 209 000 en 2002-2003. Une meilleure gestion des mers pourrait entraîner la création de 83 000 emplois dans la pêche et les industries de transformations qui en dépendent.
Malgré ces constats, la politique européenne de la pêche poursuit ses erreurs. Elle a consisté dans le passé à aider les pêcheurs en subventionnant l’amélioration de la flotte, c'est-à-dire en fait, à en augmenter la capacité. 13 milliards d’euros ont été dépensés entre 2008 et 2012.
Les Propositions de la Commission sont aujourd’hui de réduire les capacités de pêche mais en utilisant les lois du marché. Il s’agirait de créer des quotas de pêches attribués à chaque pêcheur et que celui-ci pourra revendre. Les pêcheurs artisanaux redoutent que cela n’aboutissent à une concentration des quotas entre les mains de grands industriels de la pêche et n’aboutissent qu’à des pertes d’emplois. Les petits pêcheurs et les défenseurs de l’environnement font cause commune dans cette bataille.
La Commission fait d’autres propositions : limiter les prélèvements pour parvenir à un « rendement maximal durable » pour chaque espèce. Elle propose aussi d’interdire les rejets en mer, des captures non commercialisables, qui représentent actuellement, selon des espèces de 23% à 70% de l’ensemble des prises.
Ces propositions sont contestées par les gouvernements. Les Etats pêcheurs – France, Espagne, Portugal – s’accrochent notamment au maintien des aides publiques à la modernisation des navires. Le Conseil des ministres européens a abouti à un compromis les 24 octobre dernier, qui maintient les aides à la flotte. Pour la période 2014-2020, la politique européenne de la pêche disposera de 6 milliards et demi d’euros. Les propositions de la Commission vont maintenant être examinées par le Parlement européen avant de repasser devant les ministres.
Les bateaux européens pêchent aussi hors des eaux communautaires. La commission envisage de retirer leur licence de pêche hauturière aux bateaux utilisant des équipements peu écologiques.
Les navires européens pêchent notamment au large des côtes africaines moyennant une redevance payées aux états et prise en charge à 90% par l’Union européenne. La Commission souhaite que des accords dits « de pêche durable » soient passé avec les pays africains pour s’assurer que la ressource est respectée et que les redevances soient affectées à la pêche artisanale locale. Les associations environnementales et les scientifiques contestent ces accords qui selon elles, ne luttent pas contre la surpêche et la pêche illégale, et mettent à mal la pêche artisanale.
L’Europe a des accords avec 7 pays africains. La Sénégal et la Sierra Léone ont entrepris de luter contre la pêche illégale et ont dénoncé toutes les licences de pêches des chalutiers étrangers. La Mauritanie renégocie ses accords. L’Europe a tous les moyens à sa disposition pour moraliser l’activité de pêche de ses navires sur les côtes africaines, pour sauvegarder les ressources de ces côtes et maintenir une pêche artisanale vitale pour ces pays. Elle doit le faire.