Janvier 2019
Dépasser 2018 ; construire en 2019
L’année 2018 a été difficile pour l’Europe : faute de solidarité européenne sur les migrations, élection d’un gouvernement populiste en Italie ; affaiblissement d’Angela Merkel, puis à l’automne, d’Emmanuel Macron ; hostilités de Donald Trump et de Vladimir Poutine ; menace sur le climat et sur l’ordre économique mondial ; Brexit dans l’impasse.
Pourtant l’Europe travaille dans l’intérêt de ses citoyens et a adopté des textes majeurs depuis 2014. Citons dans le domaine de l’environnement : nouvelles normes anti-pollution des moteurs diesel, directive sur l’économie circulaire, interdiction des plastiques à usage unique, projet d’Euro-redevance qui s’appliquera à tous les véhicules poids lourds ; Des textes apportant un contrepoids social à l’économie libérale européenne : coordination des régimes de sécurité sociale, directive sur les travailleurs détachés y compris dans le transport routier, projet d’Autorité européenne du travail ; Protection des consommateurs : droits des passagers des transports ferroviaires, payements par carte bancaire, la facilitation de mobilité des handicapés, la suppression des surtaxes téléphoniques à l’étranger, la protection des droits d’auteurs contre les GAFA, protection des données personnelles collectées par les opérateurs internet ; mise en place d’une coopération structurée de défense et d’un Fonds européen de défense qui permettra de financer de la recherche, des équipements, des opérations.
Ces avancées sont-elles suffisantes pour combler le déficit d’adhésion des citoyens au projet européen ? : 62% des Européens considèrent que l’appartenance de leur pays à l’Union est une bonne chose, mais 42 % seulement font confiance à l’UE (Eurobaromètre). La montée de courants d’opinions souverainistes ou populistes partout en Europe, y compris les « gilets jaunes » en France, est symptomatique des menaces pesant sur les sociétés européennes : pression de la mondialisation sur les revenus des classes moyennes, montée des inégalités, changement climatique, inquiétudes liées aux migrations et à la révolution numérique. Les résultats des Consultations citoyennes organisées dans 26 pays européens montrent les priorités des citoyens : une politique migratoire, une lutte efficace contre le réchauffement climatique, un développement durable, plus d’Europe sociale, plus de présence dans le monde et de défense des valeurs européennes, plus de démocratie dans les prises de décisions européennes, de promotion de l’identité européenne, notamment par l’éducation.
La réponse à ces menaces et ces demandes ne peut venir que d’une puissance publique à même de gérer efficacement les biens communs d’intérêt européen : sécurité, migrations, environnement, monnaie, économie et fiscalité, valeurs et mode vie des Européens.
Un collectif d’intellectuels et de responsables politiques européens, conduit par Thomas Piketty propose que des pays européens volontaires s’associent pour mettre en œuvre un budget de 4% de leur PIB, financé par des impôts européens, et consacré à l’investissement dans la formation, la recherche, la transformation de notre mode de croissance, l’accueil des migrants. Une assemblée composée de députés nationaux et de députés européens serait chargée de l’organisation et du contrôle de la politique économique et sociale européenne.
Si ce projet parait utopique au regard du manque de volonté politique des dirigeants européens, il donne l’ampleur des moyens nécessaires pour répondre à l’urgence d’une Europe politique, une Europe-puissance, qui affronte les périls climatiques et de la mondialisation.
Les élections européennes de mai 2019 doivent permettre de mettre ces enjeux en débat et de donner un cap à l’Europe.
François Vié, président du ME62